Je suis féministe hystérique quand tu es macho : déconstruire le stéréotype de l’excès

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Il est grand temps de déconstruire ce trop célèbre stéréotype de la femme « hystérique » dans le discours féministe contemporain. Cette image est confortablement logée dans l’inconscient collectif, alimentée par les représentations médiatiques et les dogmes patriarcaux. Lorsque la femme exprime une colère légitime face au machisme, elle se voit souvent étiquetée comme « hystérique ». Mais qui vraiment est l’hystérique ? Est-ce celle qui ose revendiquer ses droits, ou celui qui perpétue des normes oppressives ? Ainsi, la question se pose : pourquoi le féminisme, en tant que mouvement vital, est-il perçu comme un excès lorsqu’il se confronte au machisme ?

D’abord, examinons la notion même d’hystérie. Historiquement, ce terme a été utilisé pour marginaliser les femmes, réduisant leurs expériences à des mélodrames irrationnels. Cette pathologisation du féminin a pour but de maintenir l’autorité masculine en minimisant la capacité d’un discours sérieux sur les inégalités. Cette manière de penser n’est pas ancrée dans la réalité des luttes vécues par les femmes, mais plutôt dans une manière de contrôler celles qui osent s’affranchir du silence. Le machisme, par ses divers visages, se nourrit de cette hystérisation, désignant comme « excès » toute émotion qui dérange le confort des dominants.

Dans un second temps, examinons le contexte socioculturel qui met en lumière ce phénomène. L’hystérie, au sens sociologique, peut être entendue comme une réponse à un environnement oppressif. Le capitalisme patriarcal promeut des modèles de réussite où la soumission et la passivité sont valorisées chez les femmes. Les actes de rébellion, qu’ils soient vocaux ou silencieux, sont perçus comme dangereux. Un cri de colère contre l’injustice se transforme alors en hystérie. Les hommes, en revanche, lorsqu’ils s’affirment, sont souvent vus comme assertifs, compétents, ou même nécessaires. Le double standard s’installe : l’homme qui s’affirme est un leader, la femme qui proteste est une hystérique. Ce contraste fait émerger une multitude de questions : Pourquoi ce double discours ? Qui en tire profit ?

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Le féminisme, lorsqu’il est considéré à travers le prisme des émotions, est souvent perçu comme trop agressif. Pourtant, penser que les femmes doivent se conformer à des normes de douceur, d’aplomb et de tranquillité pour être entendues est profondément problématique. Femmes et hommes vivent des expériences d’injustice. Toutefois, les réactions sont conditionnées par des attentes sociales. Pourquoi une femme serait-elle exclue du droit légitime à l’indignation sous prétexte de maintenir un discours « civilisé » ? L’hystérie devient alors un outil de dévaluation. Et parmi les différentes formes de féminisme, le féminisme radical, souvent qualifié d’hystérique, incarne cette légitimation de l’émotion dans la lutte.

Tout en reconnaissant la diversité des voix au sein du féminisme, il est crucial de questionner la classification de ces voix. Le féminisme radical, qui défend des postures plus extrêmes, est souvent diabolisé. Les femmes qui s’identifient à cette approche s’insurgent contre le patriarcat avec une intensité qui, reconnaissons-le, peut déranger. Mais devriez-vous être calme et rationnelle lorsque vous luttez contre des siècles d’oppression ? Ainsi, la réaction face au machisme, qualifiée d’hystérique, doit être réévaluée. Un cri de révolte est souvent le produit de décennies, voire de siècles de silence.

Parlons également des représentations médiatiques du féminisme. Les films, livres et autres supports culturels façonnent notre perception collective. Des personnages féminins « hystériques » sont souvent présentés comme des aberrations, des exceptions à la norme, un déséquilibre comique ou tragique. La réalité, cependant, est que la colère des femmes n’est pas une anomalie, mais une réponse justifiée aux injustices. Les médias ont une grande responsabilité dans la façon dont ils modèlent les messages féministes et les présentent au public. En véhiculant des stéréotypes, ils entretiennent un cycle d’incompréhension et de mépris. La représentation de la colère féminine comme hystérie sert à éviter d’adresser la source réelle de ce mécontentement.

Pour conclure, « Je suis féministe hystérique quand tu es macho » doit devenir un cri de ralliement, non une étiquette dégradante. Le féminisme ne devrait pas être synonyme de douceur ou de tempérance. C’est un mouvement d’affirmation, d’authenticité, d’expression de toutes les émotions, y compris la colère, qui surgit dans un monde patriarcal. Le défi consiste à réévaluer nos compréhensions des émotions et à reconnaître que derrière chaque geste jugé « hystérique », se cache une histoire de lutte, de douleur et de résistance. Il est temps de défaire le stéréotype de l’excès et de rejoindre le combat pour un futur où chaque voix, qu’elle soit calme ou enragée, soit entendue et validée.

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